Certifications ISO dans le domaine de la traduction

Par Xavier Giuliani, étudiant M1 TSM

Que ce soit dans les secteurs de l’industrie, de l’agriculture, du commerce ou encore de la santé, vous avez sans doute déjà au moins une fois entendu parler des normes ISO. Elles sont présentes quasiment partout et permettent d’assurer la qualité et la sécurité d’un produit ou d’un service. Mais alors qu’est-ce que l’ISO exactement ? Et surtout, quelles sont les différentes normes en application dans le domaine de la traduction ?

Avant d’aborder les spécificités relatives au domaine de la traduction, je vous propose tout d’abord un bref récapitulatif sur le fonctionnement de l’ISO afin de mieux comprendre les tenants et les aboutissants liés à l’élaboration de ses normes.

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L’ISO, Qu’est-ce que c’est ?

Depuis son entrée en activité le 23 février 1947, l’Organisation internationale de normalisation (plus connue sous l’acronyme ISO) vise à élaborer des normes « fondées sur une expertise mondiale » et « répondant à un besoin du marché » En d’autres termes, l’ISO ne décide pas elle-même d’élaborer des normes à appliquer mais consulte les différentes parties prenantes (entreprises, associations de consommateurs, ONG, etc.) afin de définir des spécifications et des lignes directrices conformes au besoin du marché. À cet effet, l’ISO compte parmi ses membres un réseau mondial de 164 organismes nationaux de normalisation dont l’AFNOR pour la France.

À ce jour, ce sont plus de 23 090 normes qui ont été élaborées tout domaine confondu. Vous pouvez consulter l’ensemble des normes de l’ISO en vigueur dans l’ISO Store. Plus précisément, les normes sont établies par des groupes d’experts réunis par domaine en Comités techniques (TC). Le Comité technique qui s’occupe exclusivement des enjeux relatifs au domaine de la traduction est le Comité technique 37, sous-comité 5 (ISO/TC 37/SC 5) : « Traduction, interprétation et technologies apparentées ».

À présent, je vous propose d’entrer dans le vif du sujet avec les principales normes en application dans le secteur.

ISO 9001:2015 – Systèmes de management de la qualité

Selon le mode d’emploi officiel de l’Organisation internationale de normalisation, l’ISO 9001:2015 « est une norme qui établit les exigences relatives à un système de management de la qualité » (SMQ) afin d’aider les entreprises « à gagner en efficacité et à accroître la satisfaction de leurs clients ». Bien que cette norme généraliste soit applicable à l’ensemble des entreprises du secteur tertiaire, elle est fermement établie dans bon nombre d’agences de traduction.

Le management de la qualité repose sur sept principes, le plus important étant « l’orientation client » qui vise à satisfaire voire à dépasser les demandes du client. Le SMQ passe également par un « leadership » fort, c’est-à-dire par la définition d’une vision claire et par l’assignation d’objectifs à atteindre compris par tous. Le troisième pilier est « L’implication du personnel » à tous les échelons qui permet d’augmenter la productivité au sein d’une entreprise. Ce principe facilite l’organisation ainsi que l’optimisation des ressources notamment lorsqu’une « approche processus », c’est-à-dire la conception au sein de l’entreprise d’une chaîne d’activités dépendantes les unes des autres, est également mise en place. Par ailleurs, cette norme insiste sur l’importance de « l’amélioration » continue des processus ainsi que sur la « prise de décision objective fondée sur des preuves » car elles permettent de réduire le niveau d’incertitude. Enfin, « le management des relations avec les parties intéressées » est un fondement qui a été intégré dans le management de la qualité car il aide à concevoir les relations entre les partenaires sur le long terme afin de mieux optimiser les ressources en fonction des besoins.

En ce qui concerne la reconduction de la certification, la norme ISO 9001:2015 doit être renouvelée tous les trois ans par le biais d’un audit externe avec des audits intermédiaires de suivi tous les six mois.

ISO 17100:2015 – Exigences relatives aux services de traduction

Selon l’Organisation internationale de normalisation, la norme ISO 17100:2015 « spécifie les exigences relatives à tous les aspects du processus de traduction ayant une incidence directe sur la qualité et la prestation de services de traduction ». Cependant, le traitement de la traduction automatique, qui est devenu monnaie courante au sein des agences, ne relève pas de ce standard.

Dans ce document, l’ISO structure les trois étapes du processus de traduction (préproduction, production et postproduction) et ce pour des agences de traduction de toute taille. Une plus grande priorité est accordée à la traçabilité, à la révision, aux supports et outils technologiques ainsi qu’aux fonctions et responsabilités des différents professionnels concernés (chefs de projets, traducteurs, réviseurs, relecteurs-experts, correcteurs d’épreuves, etc.). En outre, la traduction doit être effectuée vers la langue maternelle du traducteur afin de fournir un produit final de qualité.

Les compétences professionnelles revêtent une importance capitale car, pour obtenir la norme ISO 17100:2015, les agences de traductions doivent obligatoirement travailler avec des traducteurs et des réviseurs qualifiés titulaires d’un diplôme d’études supérieures en traduction reconnu par l’État en plus d’accumuler au moins cinq ans d’expérience professionnelle dans le domaine.

Cette norme fixe également les principes de collaboration entre les prestataires de services linguistiques (PSL), les prestataires de services de traduction (PST) et les clients (encore appelés donneurs d’ouvrage). Le PST doit par exemple initier au préalable un processus dédié à la gestion des retours d’informations vis-à-vis de ses clients. La distinction entre PSL et PST est mince car le PSL peut être considéré comme un PST si celui-ci fournit des services de traduction. Toutefois, Le PSL est plus généralement défini selon cette norme comme étant une « personne ou une organisation fournissant des services en relation avec les langues ». À titre d’exemple, la société SDL Trados est considérée comme un PSL car elle fournit des solutions logicielles de TAO.

La norme ISO 17100:2015 fait également la distinction entre l’« auto-vérification », et plusieurs types de révisions : la « révision », la « relecture-expertise », la « correction d’épreuves » ainsi que la « révision finale ». Le travail d’auto-vérification est d’abord effectué par le traducteur qui est par la suite complété par la phase de révision obligatoirement réalisée par une tierce personne. La révision consiste à réaliser une comparaison bilingue entre la langue source et la langue cible. Cette étape peut éventuellement être accompagnée d’une relecture-expertise monolingue de la langue cible par un professionnel qui n’est pas nécessairement traducteur. Vient ensuite la phase obligatoire de correction d’épreuves avant impression. Pour terminer, la révision finale est opérée par le chef de projet afin de vérifier que les instructions du guide de style ont bien été suivies.

En ce qui concerne la reconduction de la certification, la norme ISO 17100:2015 doit être renouvelée tous les six ans par le biais d’un audit externe avec des audits intermédiaires de suivi tous les deux ans.

ISO 18587:2017 – Exigences relatives à la post édition d’un texte résultant d’une traduction automatique

Selon l’Organisation internationale de normalisation, la norme ISO 18587:2017 « spécifie les exigences relatives au processus de post-édition humaine complète d’un texte résultant d’une traduction automatique et aux compétences des post-éditeurs ». Les mesures qui y sont présentées définissent le cadre d’intervention du post-éditeur à partir de l’obtention des résultats issus de la machine. En d’autres termes, cette norme ne vise pas à réglementer les systèmes de traduction automatique (TA) à proprement parler car ces technologies sont en évolution constante.

Dans le cadre de cette norme, les PST sont dans l’obligation d’assurer une équivalence entre le texte source et le texte cible et de garantir la compréhension des résultats obtenus par le système de traduction automatique neuronale (TAN).

Par ailleurs, la norme ISO 18587:2017 distingue deux types de post-édition (PE) : la « post-édition complète » et la « post-édition superficielle ». La PE complète vise à obtenir un résultat équivalent à celui issu d’une traduction humaine. En revanche, la PE superficielle (également dénommée post-édition légère) permet d’obtenir un « produit qui soit simplement compréhensible sans tenter de parvenir à un produit comparable à celui obtenu par traduction humaine ».

Cela implique que le post-éditeur doit être formé à la reconnaissance des résultats provenant d’un système de TA mais également être capable d’apporter des modifications stylistiques, terminologiques et typographiques en plus de respecter les exigences du guide de style du client (notamment dans le cadre d’une PE complète). Ainsi, il doit être en mesure d’accéder aux ressources de références et d’estimer la difficulté ainsi que la durée de la tâche de post-édition à réaliser.

Une norme pour la traduction juridique et judiciaire prévue pour avril 2020

La norme ISO 20771 « relative aux exigences de la traduction juridique et judiciaire » sera prochainement disponible à partir d’avril 2020. Actuellement en cours de publication depuis la validation du « Final Draft International Standard » (FDIS) fin février dernier, ce standard spécifie les exigences concernant les compétences et les qualifications des professionnels de la traduction juridique en plus de définir l’ensemble des processus et des ressources liées à ce type de tâche affectant directement la qualité des prestataires de traduction spécialisés dans le domaine juridique.

Pour finir, je voudrais mettre à disposition quelques informations pratiques pour celles et ceux qui envisagent éventuellement d’obtenir une certification ISO. L’Organisation internationale de normalisation n’est pas un organisme de certification. Elle recommande sur son site de comparer différents organismes d’accréditation et de vérifier si elles appliquent les « normes appropriées » du Comité pour l’évaluation de la conformité (CASCO). Il vous est possible, entre autres, de vous renseigner sur les organismes de certifications accrédités auprès de l’International Accreditation Forum (site en anglais) ou bien auprès du Comité français d’accréditation (COFRAC).

 

Sources :

http://www.telelingua.com/uploaded/pdfs/telelingua_iso_standards_2018-09_-_fr_lrs_plano.pdf

https://blog.m21global.fr/quest-ce-la-nouvelle-norme-iso-171002015/

https://blog.supertext.ch/fr/2020/02/meme-la-post-edition-devient-super-supertext-est-certifiee-iso-18587/

https://infostore.saiglobal.com/en-au/standards/iso-fdis-20771-2020-1173180_saig_iso_iso_2795867/

https://norminfo.afnor.org/norme/PR%20NF%20ISO%2020771/traduction-juridique-et-judiciaire-exigences/112685

https://www.afnor.org/le-groupe/qui-sommes-nous/

https://www.cofrac.fr/qui-sommes-nous/

https://www.cpsl.com/fr/pourquoi-travailler-avec-des-fournisseurs-de-services-linguistiques-certifies/

https://www.inter-contact.de/fr/blog/traductions-certifiees-iso-17100

https://www.iso.org/files/live/sites/isoorg/files/store/fr/PUB100373_fr.pdf

https://www.iso.org/fr/casco.html

https://www.iso.org/fr/certification.html

https://www.iso.org/fr/committee/654486.html

https://www.iso.org/fr/developing-standards.html

https://www.iso.org/fr/standard/69032.html?browse=tc

https://www.iso.org/fr/standards-catalogue/browse-by-ics.html

https://www.iso.org/obp/ui/#iso:std:iso:17100:ed-1:v1:fr

https://www.iso.org/obp/ui/#iso:std:iso:18587:ed-1:v1:fr

https://www.tradonline.fr/blog/quest-ce-que-la-nouvelle-norme-de-traduction-iso-17100/

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